La cantate Schwingt freudig euch empor fut d’abord composée en 1725 pour un hommage, puis révisée en 1726 pour un anniversaire princier, adaptée ensuite au premier dimanche de l’Avent en deux versions successives (1730 et 1731) avant une dernière mouture à nouveau profane en 1735… c’est peu dire qu’elle aura fait de l’usage !

Si la version 1731 est universellement retenue, c’est que Bach eut là l’idée qui donnerait toute son unité à sa cantate : il remplaça les récitatifs d’origine par de courts numéros élaborés à partir du choral de Luther Nun komm, der Heiden Heiland. L’évocation réitérée de ce thème, un des plus fameux de la Réforme, baigne toute la pièce dans une même louange.

Le hautbois d’amour, compagnon fidèle des tendres évocations de la Nativité, est omniprésent. Il partage d’abord les formules rythmiques pleines d’allégresse du premier chœur.

Il double ensuite les voix dans le duo soprano-alto qui brode à partir des quatre premières lignes du choral de Luther.

Il tient ensuite le rôle de co-soliste dans l’air de ténor, entretenant sans relâche le mouvement qui tire le chanteur en avant.

La première partie de la cantate se clôt sur l’harmonisation à quatre voix d’un autre choral célèbre, Wie schön leuchtet der Morgenstern (Comme elle brille, l’étoile du matin).

La seconde partie s’ouvre sur un air de basse. Il est solidement accroché à son Willkommen (Bienvenue !) initial, mais également plein d’ivresse, à tel point que les exclamations de joie s’y bousculent et se mélangent.

Puis Bach provoque une forte tension. Le ténor chante en notes longues une strophe du choral qui évoque les faiblesses de la chair pendant que les deux hautbois et le continuo semblent courir vers l’abime.

L’air suivant vient dissiper cette angoisse. Il y répond avec calme, effleuré par un violon con sordino. C’est une voix étouffée (gedämpft), modeste, qui se fait entendre, une voix musicienne, comme un écho aux cithares évoquées dans le choral qui concluait la première partie.

Soprano et violon rivalisent d’imagination et amènent au choral final. Luther, toujours. Même tonalité, même ligne de chant que pour le ténor. Mais la voix n’est plus seule. Un sentiment de force se dégage maintenant du chant d’assemblée.

Ce choral de Luther, Bach en fit l’ossature des deux autres cantates pour le premier dimanche de l’Avent qui nous sont parvenues (BWV 61 et 62). Il existe aussi trois préludes pour orgue sur ce thème. Bach les composa à la Cour de Weimar puis les remania et les rassembla à Leipzig, quarante ans plus tard, dans son ultime recueil d’orgue. Le dernier des trois (BWV 661) est donné ici dans la version de jeunesse, qui nous est parvenue par un autre chemin : c’est le cousin de Bach, Johann Gottfried Walther, qui l’avait recopiée.

Christian Leblé

La présentation complète de chaque cantate jouée dans ce cycle au temple du Foyer de l’Âme est accessible sur le site Les Cantates.