Les concerts du mois – Avril 2024

Les Cantates

Dimanche 7 avril
à 17h30

Cantate BWV 249
Oratorio de Pâques

coordination artistique Graham O’Reilly

La cantate Kommt, eilet und laufet a été composée pour la fête de Pâques à Leipzig en 1725. Bach y met en scène quatre personnages bibliques devant le tombeau du Christ vide, premier face à face avec l’évidence de la résurrection et la victoire sur la mort que symboliste Pâques.

L’ouverture orchestrale est comme le blason de cette célébration. Toute allégresse, elle fait défiler les groupes instrumentaux, cuivres, bois, cordes, dans une forme de rondo où l’on repasse régulièrement par un refrain collectif.

Le lever de rideau proprement dit intervient ensuite. Bach va rejouer cet instant de Pâques pour ausculter la conscience humaine. Il ramène donc ses auditeurs à la désolation, quand, après la crucifixion, quelques fidèles ont pu donner une sépulture au martyr. Instruments aux gestes engourdis de tristesse, musique funèbre tendue par la déploration du hautbois.

Mais bientôt réapparaît le thème initial et le chœur s’engouffre dans la brèche. Il semble dévaler les escaliers, sauter les talus, courir à perdre haleine. L’orchestre n’a de cesse de lui redonner de l’élan. Rarement musique portera aussi bien un texte.

Un court passage du chœur a mis en avant deux personnages, ce sont les apôtres Pierre et Jean. Les voici qui entrent maintenant vraiment en scène, accompagnés de Marie-Madeleine et Marie mère de Jacques (patronyme qui la distingue de la mère du Christ). Leur premier dialogue est presque ironique, teinté de reproches, les apôtres s’étant tenus à bonne distance des évènements.

Le corps du Christ n’est plus dans le tombeau mais la joie n’est pas encore de mise. C’est la stupéfaction qui saisit les témoins devant le mystère divin capable d’arracher l’homme à la mort. On pénètre dans ce lieu sombre avec une infinie prudence, sur la pointe du pizzicato des cordes. La flûte et la voix semblent constituer deux faces du personnage de Marie, dont le sentiment intérieur vient affleurer en paroles.

Le dialogue reprend, les hommes sont perplexes, les femmes ont appris d’un ange que le Christ était ressuscité.

Bach écrit pour Pierre un air étranglé d’émotion. La mort ne sera plus désormais qu’un simple sommeil (nur ein Schlummer, dans l’extrême grave du ténor). Ce sommeil est figuré par le halo de deux flûtes à bec et la sourdine qui prive les cordes de leur brillant, sur des basses lentes.

Bach varie maintenant le traitement de ses récitatifs avec un duo féminin. La musique est irriguée par une certitude nouvelle, encore fragile.

Par un air fiévreux, Marie-Madeleine réclame la présence rassurante du Sauveur. L’alto comme le hautbois d’amour semblent ne jamais reprendre leur souffle. Et le personnage s’effondre au milieu de l’air, poignante suspension avant la conclusion.

Jean, l’apôtre à la voix de basse (celle de Dieu), vient balayer le doute et annonce la conclusion de l’œuvre. Pas de choral méditatif, non, un chœur de gloire et de puissance !

Yodel des cuivres à l’assaut, martèlement des timbales, poussée irrésistible des basses ! Les voix convergent, avant qu’un dernier galop, lancé en fugue, ne scelle ce triomphe.

Christian Leblé
Les Cantates