Les concerts du mois – Février 2020

Les Cantates

Dimanche 2 février – 17h30

Cantate BWV 111 « Was mein Gott will, das g’scheh allzeit »

Coordination artistique Bruno Boterf

La cantate Was mein Gott will, das g’scheh allzeit a été jouée pour la première fois le 21 janvier 1725 à Leipzig. C’est une cantate de choral, c’est à dire qu’elle ne s’inspire pas des lectures bibliques prévues pour l’office de ce dimanche mais se développe à partir d’un hymne ancien, dont Bach retravaille le texte et la musique.
Ce cantique est l’œuvre d’un prince humaniste et cultivé, Albrecht von Brandenburg (1490-1568), qui sortit la Prusse du Saint Empire de Charles Quint et s’en fit un duché… Voilà que les cantates plongent dans l’histoire politique !
Ce cantique insiste de tout son poids sur l’autorité d’un Dieu qui décide en toutes choses et sur la confiance qu’il faut mettre en lui. La musique sur laquelle ce texte spirituel voyageait à l’époque est du compositeur français Claudin de Sermisy (1432-1562).
C’est cette mélodie que les sopranos vont faire entendre dans le premier chœur.
Autour d’elles, les trois autres voix anticipent et prolongent le texte. Elles l’entourent d’un halo éblouissant et créent une unanimité en zigzags, un ensemble qui sature l’espace sonore de sa conviction. C’est sûr, il ne s’agit pas d’une prière qui s’élève, mais bien d’une force divine qui s’impose à tous.
L’air qui suit est un champ-contrechamp à la Bach : l’homme est face au Dieu puissant, mais leurs caractères respectifs sont mélangés dans la musique : le timbre est celui de la basse, souvent associé à Dieu; l’accompagnement instrumental est craintif; le texte rassurant; la ligne vocale est pleine d’hésitations.
On trouvera peu de contraste entre cet air et le récitatif d’alto qui s’annonce. En fait Bach scinde là en deux le second verset du cantique original qu’il paraphrase, pour mieux exposer les deux idées qui y cohabitent : la basse clame combien il est inutile de lutter contre la volonté de Dieu et son dernier mot, widerstreben, est tendu à l’extrême comme un bras de fer. A sa suite, l’alto brandit en contre-exemple la figure du prophète Jonas dans l’Ancien Testament.
Bach fait de même avec les deux numéros suivants qui se partagent le troisième verset. Mais le compositeur trouve un regain de variété, car la voix d’alto commune au récitatif et au duo crée un pont entre ces deux blocs.
Le duo ne déparerait pas dans la Flûte enchantée. Il va de l’avant avec confiance, avec insouciance même : la perspective de la mort semble n’être d’aucun poids.
Nous y voilà pourtant. Les hautbois sonnent une musique grave quand la soprano prend la parole. L’heure ultime, dernier combat. Le renfort de Dieu assure la victoire. La tension s’annule dans la dernière phrase qui s’envole en un chant soulagé et fait basculer la cantate dans le dernier verset du cantique original. La parole séculaire (ce cantique a presque deux siècles quand Bach écrit cette cantate) s’impose d’évidence.