Le concert du mois – Juin 2021

Les Cantates ont suspendu leur cycle depuis avril 2020 et afin de pouvoir reprendre leurs concerts publics, les Cantates et la paroisse du Foyer de l’Âme ont voulu s’associer dans un culte-cantate, un moment qui associe spiritualité et musique, à la manière de ce que vivait Bach quand sa musique était jouée pendant le culte du dimanche à Leipzig.

Pour le culte-cantate du dimanche 6 juin qui a eu lieu au Foyer de l’Âme, c’est la cantate BWV 187 « Es wartet alles auf dich » qui a été choisie pour l’occasion.

Vous trouverez également en PDF le programme complet de la cantate.

Bonne écoute !

Les Cantates

Dimanche 6 juin 2021

Cantate BWV 187
« Es wartet alles auf dich »

Avec l’aimable autorisation des musiciens

Chant

Kaoli Isshiki-Didier – soprano
Ayako Yukawa – alto
Benoît Porcherot – ténor
Olivier Gourdy – basse

Orchestre

Pierre-Eric Nimylowycz, Yuna Lee, Guya Martinini, Diana Lee – violons
Yoshiko Morita – alto
Timothée Oudinot, Nathalie Petitbon – hautbois
François Poly – violoncelle
Marouan Mankar-Bennis – clavecin

Frédéric Rivoal – orgue et coordination

Nous sommes entrés dans le Temps de la Trinité, la partie la plus longue de l’année liturgique. Bach a composé la cantate Es wartet alles auf dich à Leipzig en août 1726. C’est une cantate qui réaffirme la bonté de Dieu. Sa forme est très symétrique, avec au centre un aria de basse, la voix par laquelle s’incarne le Christ.

La première partie est quasiment toute entière occupée par l’imposant chœur fugué. Son titre est du Psaume 104 qui chante les splendeurs de la création. Les deux versets choisis pour la cantate évoquant l’espoir des êtres en l’abondance divine qui pourvoit à leurs besoins. On retrouve dans le chœur ces deux éléments : des cascades de double-croches à profusion d’un côté, et de l’autre un geste musical interrogateur, tourné vers le haut, qui exprime l’attente des croyants.

Deux interventions viennent ensuite décrypter ce surprenant tableau sonore, luxuriant comme une forêt vierge.

Un récitatif s’interroge faussement candide sur qui peut entretenir pareil univers.

Un air d’alto vient lui répondre, avec une sérénité dansante. C’est un peu la communauté des croyants parlant d’une seule voix, reconnaissant Dieu comme son bienfaiteur.

A l’époque de Bach s’insérait ici la prédication pendant le culte.

A la reprise de la musique s’opère cette jonction qu’on retrouve souvent : une citation du Nouveau Testament. C’est ici un extrait de l’un des principaux discours du Christ, son Sermon sur la montagne, tel que le rapporte Matthieu.

C’est le cœur de la cantate, où la voix du Christ se fait entendre. La goût de cet air est très particulier : l’harmonie est assez tendue, la texture instrumentale – violons et basse continue – assez austère, on se demande s’il ne va pas pleuvoir. C’est l’inquiétude de l’homme quand sa subsistance qui est là en toile de fond, sur laquelle la parole généreuse vient agir. On la sent plus chaude dans la seconde partie de cet air très bref. Car si cet air est bien au centre de la cantate (trois numéros le précèdent et trois autres le suivent), s’il est théologiquement parlant son point culminant (la parole divine) il ne fonctionne pas seul. Il propulse, il prépare un air de soprano qui vient s’ouvrir comme un parachute.

Un grand ralenti solennel s’opère en effet avec ce surprenant trio dans lequel s’articulent voix, hautbois et basse continue. C’est d’abord humble et frissonnant de reconnaissance. Ça devient peu à peu confiant, lumineux, évident : ces dons que Dieu répand, il y en a pour chacun, donc pour moi aussi, pense l’homme qui se balance entre ciel et terre.

Un récitatif suggère « la morale de l’histoire » que le grand choral final – l’hymne Singen wir aus Herzensgrund (chantons du fond du cœur) – viendra reformuler avec ses allures immémoriales.

Christian Leblé

→ http://www.lescantates.org/