Résister
C’est au cœur de l’Ardèche que j’écris ces quelques mots en ce début du mois de septembre. Ici dans cette terre huguenote, je me trouve à proximité du Bouschet-de-Pranles, où naquit Marie Durand, ainsi que son frère Pierre. Une famille opiniâtre, qui a été décimée par la terrible répression contre les protestants qui célébraient le culte dans la clandestinité depuis la Révocation de l’Édit de Nantes de 1685.
Marie Durand tombée dans l’oubli, redécouverte à la fin du XIXe siècle, est devenue une héroïne de cette résistance huguenote. Emprisonnée, dans la Tour de Constance à Aigues-Mortes, elle n’avait qu’un seul mot à prononcer pour recouvrir la liberté, « j’abjure ». Elle et ses compagnes protestantes ne l’ont pas fait, préférant mourir dans une prison sans hygiène, humide et suffocante.
Malgré les souffrances d’une famille décimée, un père emprisonné, une mère disparue sans doute morte enchaînée lors du long trajet à pied vers le lieu de sa condamnation, un frère, pasteur du Désert exécuté par pendaison à Montpellier, Marie n’a pas fléchi. Femme lettrée, ayant une autorité naturelle sur les autres prisonnières, elle aurait gravé sur la margelle du puits « régister » selon l’orthographe vivaroise. Elle est finalement libérée en 1768 après 38 années de prison.
Ce « résister » devenu le mot d’ordre de la minorité réformée ne doit pas être oublié alors que s’amoncellent aujourd’hui des nuages sombres et menaçants.
Jean-Paul AUGIER
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