De l’avent… jusqu’à l’APRES

Par Lina Propeck

« Midi le Juste ».
Expression de poète.
Soleil, en son zénith.
Gloire.

Exact instant.
Elle est là. Assise au bord du puit, la cruche à ses pieds, elle est … là… cette toute jeune fille.

Sous le soleil brûlant se repose cette jeune fille ?

Non.
Un souffle. Un souffle infime s’est levé. Un souffle infime la retient.
Elle entend … mais … « cela » est en elle : elle entend en elle.
Etrange.
En elle ?
Oui, en elle, se dit le terrible message.

Elle se lève.
Comme dans un rêve elle se lève, saisit sa cruche, la pose sur sa tête, s’éloigne.
Mais sur l’ocre du sable demeure la trace de son pas.
Au creux de la terre, demeure cet instant.

Voilà le village.
Voilà ces maisons de briques de terre, séchées au soleil.
Voilà sa maison.
La maison de ses parents qu’elle habite pour quelques temps encore car elle est promise.
C’est elle la toute jeune promise du charpentier ?
Oui. C’est elle.
Et elle en est très fière car il est homme instruit.
Son métier demande qu’il sache lire, écrire, compter.
Et elle ?
Elle ? Elle est une fille. Elle n’a appris que le métier d’épouse et de mère.

C’est cela : elle n’a jamais appris à … « entendre en elle ».
Lentement elle dépose la cruche. Monte sur la terrasse. Se blottit, petite forme sous le feuillage de la vigne.
Entendre en elle. Elle n’a jamais appris. C’est vrai. Et pourtant elle sait.
Cette si jeune enfant sait ce qu’en elle le Souffle a murmuré.

Elle doute ?
Bien sûr qu’elle doute !
Elle rejette ?
Bien sûr qu’elle rejette !

Elle portera en elle l’Enfant de Lumière.
Son enfant.
De son enfant elle rejette, elle rejette oui, de son enfant ce Destin tragique annoncé.

Viendra le chemin vers l’étable.
L’Enfant ? Où est l’Enfant ? L’Enfant sur lequel brille l’Etoile ?
Il est là.
Serré contre elle, il est là.
Elle l’écarte ; le regarde ; voit.
Elle voit le Souffle en l’Enfant ; la Lumière en l’Enfant.
Alors, doucement, le détache d’elle.
Puis, au milieu des hommes, dépose l’Enfant.

Viendra la mort.
Demeurera le Juste.
S’élèvera le Juste.
Au-dessus des hommes s’élèvera le Juste.
Jusqu’au milieu des camps de la mort, oui, au milieu même des champs de haine, au milieu même du désespoir des hommes, en plein Midi, oui en plein Midi : le Juste s’élèvera.

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